Le 04/08/10, 10:10
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On part sur le trek avec une première nuit à Rumstse. Nous sommes le 5 aout, le ciel est impressionnant, il est noir, du jamais vu ici. On entend de plus en plus de coups de tonnerre qui se rapprochent. Il pleut beaucoup, heureusement notre guide nous a dégoté une vieille maison étape pour dormir, je suis vraiment contente de ne pas dormir sous la tente. Nous faisons connaissance avec l'équipe de porteurs, les mules, le cuisinier. Des gars extras, limite émouvants, je les adorent, il se dégage quelque chose de leur regard et de leur parole, ca doit être encore imprégné du bouddhisme, de l'expérience de la vie. Tout est prêt pour le départ demain, sauf la météo qui ne fait que se détériorer et qui nous inquiètent, même si personne ne veut être pessimiste en ce début de trek. Le cuisinier nous prépare des festins, nous avons 5 plats chauds sur la table, tout est délicieux. Moi qui croyais que j'allais enfin m'affiner! La nuit, l'orage bat son plein. La montagne tremble autour de nous. Impossible de savoir si c'est normal et les guides ne veulent pas nous inquiéter à ce stade du trek. Ce que nous ne savons pas encore, c'est que ces orages sont à l'origine de la catastrophe à Leh. Une coulée de boue emportera la banlieue sud, la plus pauvre bien entendu. Nous partons le lendemain matin comme prévu, la pluie s'est calmée. Au programme une journée de marche tranquille pour faire notre première nuit en campement. nous commençons à rencontrer les paysages sauvages du Laddakh. Nous traversons des rivières avec de l'eau glaciale juste au dessus des genoux, ça revigore! Le courant est à la hauteur du déluge de la nuit...heureusement qu'il ne faut pas retraverser ces rivières au retour! Nous finissons cette journée de marche sous la pluie mais dans la bonne humeur générale. Les tentes sont assez robustes sous les averses persistantes, c'est rassurant. Nous nous endormons tôt, le lendemain nous avons notre 1er col à plus de 5000 m à franchir. Notre guide nous fait des rigoles autour de notre tente, la toile commence a perlée...on retend les extrémités au possible, ça tiendra....ouf. Nous ne sommes toujours pas au courant de ce qui se passe à Leh. Le lendemain est une très longue journée de marche. Céline commence à ressentir l'altitude et nous inquiète. Je me rassure sur mon état, je marche plutôt bien même sans entrainement. 5300 mètres! Nous avons ensuite une autre journée de marche pour arriver au plateau du Tso Kar ou nous nous reposerons avant de faire l'ascension. Les pluies sont toujours aussi insistantes toutes les nuits.
Au Tso Kar, nous rejoignons du monde, une dizaine de tentes au moins sont déjà plantées quand nous arrivons. Les équipes de trek sont coincées par les pluies, les rivières sont maintenant trop hautes pour être traversées et nous permettre d'atteindre le fameux lac du Tso Moriri. Nous attendons le lendemain pour aviser, les informations sont assez unanimes, impossible de rejoindre le Tso kar et même impossible de faire demi tour les rivières ont gonflées pendant la nuit. Les routes sont également coupées emportées par les coulées de boue. Nous somme donc coincés sur notre plateau sans aucune possibilité d'avancer ni de reculer. L'ascension n'est bien entendu pas recommandée, nous annulons le reste du trek. Notre préoccupation consistera à trouver un moyen de rentrer. Heureusement, nous avons les moyens de survivre pendant plusieurs jours et il nous reste encore assez de gaz. Nous avons maintenant tout le temps de bavarder avec les autres équipes de trek, c'est là que nous apprenons la catastrophe et le nombre de disparus qui passe de 200 à 600 en une journée. Un des guides a un téléphone satellite et nous demande notre nom pour informer l'ambassade de notre localisation. L'ambassade française commence a se préoccuper du nombre de français disparus. Mais, il ne veut pas se servir de son téléphone pour autant et nous trouver un moyen de rentrer a Leh ou ailleurs... ils partiront en voiture, sans nous informer de quoi que ce soit. Nous voilà sans voiture de disponible, ni téléphone. Nous ne paniquons pas encore, nous n'avons pas conscience du risque et n'avons pas encore eu le temps de nous impatienter. Le lendemain, nous partons avec le guide dans le village le plus près d'ici (c'est à dire a deux heures de mules) pour trouver un téléphone satellite et peut être une voiture. Shanti m'informe de la réalité de la situation a Leh, les disparus sont sous les décombres, une coulée de boue a emporté la banlieue pauvre du sud ne faisant qu'une bouchée des maisons de fortune. Les moyens de communication avec Dehli sont très mauvais et par conséquent l'aide, le ravitaillement et les soins médicaux sont limités. Le Choléra menace de pointer son nez pour clouer le spectacle. L'ambassade française a été mise au courant, on nous cherche, je redonne notre situation, loin d'être alarmante pour eux, nous pouvons attendre... je leur fais comprendre que Céline a sans doute besoin de redescendre en altitude pour se sentir mieux mais je ne pense pas qu'ils prennent notre cas au sérieux. Ils me promettent une voiture, mais pour quand? Il faut que ce soit moi qui fasse l'effort de revenir refaire mes 2 heures de mule pour téléphoner demain si je veux en savoir plus. Je pense qu'ils nous sont inutiles, avec le guide nous sommes a présent persuades qu'ils faut que nous nous débrouillons tous seuls, ce n'est pas l'agence à Leh, encore moins celle de Dehli qui va nous aider. Nous rentrons bredouille et croisons des chevaux sauvages qui courent dans ce haut plateau, c'est d'une beauté ahurissante. Le soleil cogne, la lumière est aveuglante, les mules s'épuisent a s'enfoncer dans la boue stagnante. A notre arrivée au camp, que de mauvaises nouvelles a annoncer si ce n'est que le téléphone marche et que nous avons informe l'agence de notre situation. La soirée sera plus decontractee, les pluies diluviennes se sont enfin arrêtées, nous nous sentons un peu plus en sécurité, l'eau a arrêté de monter. Nous décidons de repartir téléphoner demain au village, pour essayer de trouver une voiture. Il faut que l'on bouge d'ici, nous n'avons plus beaucoup de gaz. Le lendemain rebelote, re-mule, re-telephone a l'agence qui n'a bien entendu pas trouvé de voiture a nous envoyer...déception, nous devons encore attendre. Nous perdons confiance en l'agence et decidons de nous débrouiller par nous même pour gagner du temps.
En sortant du village, nous trouvons une voiture, garée là, nous discutons avec les villageois pour trouver le propriétaire et négocier un retour. La voiture n'a pas assez d'essence pour retourner à Leh...une moto est également là mais le propriétaire refuse de faire le trajet pour nous... à la rigueur (vu notre appel au secours), il accepterait de déposer notre guide sur la grande route pour qu'il puisse arrêter une autre voiture. C'est notre seule solution. Je me prépare a rentrer sans mon guide en lui souhaitant bon courage d'attendre le long d'une route sous un soleil de plomb et sans eau...et là deux voitures arrivent sur la route comme par miracle. Nous courons à leur rencontre, il ne faut pas les laisser passer. Les voitures s'arrêtent. La première est une voiture de police qui ne souhaite pas vraiment nous secourir, ils ne sont pas très informés de la situation. Mais heureusement, l'autre veut bien nous emmener si nous payons son prix. Cependant, il ne sait pas son prix, il faut qu'il réfléchisse, pas fou... c'est l'occasion rêvée de faire de l'argent, je crois que nous sommes de toutes les façons prêts a payer pour sortir de cette impasse. Nous négocions tout de même un prix tres raisonnable finalement ...compte tenu de la situation, de l'état de la route, de la tonne de matériel a emmener...yes, nous sommes sauves, Merci d'être passe par la. Nous laissons les mules et rentrons en voiture. Notre arrivée au camps est applaudie. Nous chargeons les affaires, faisons nos adieux aux muletiers qui vont couper dans la montagne par le sud...et traverser les rivières, les courageux, nous n'oublions pas de les remercier et de leur donner leur pourboire avant de partir en direction de Rumtse, la route doit être réouverte. Le trajet est rude, la voiture est beaucoup trop chargée. Nous devons nous arrêter sur la grande route pour prendre une 2eme voiture et décharger la 1ere. Nous croisons les gars qui font les travaux pour refaire la route qui s'est complétement écroulée. Ils travaillent dans des conditions extrêmes en dormant dans des tentes de fortunes a plus de 5 000 mètres d'altitude. Nous arrivons le soir a Rumtse, heureux de retrouver un lit et des murs. Je repense a ces muletiers toute la nuit, nous les avons laisser sur ce plateau seuls, pourvu qu'ils trouvent un chemin pour rentrer chez eux en toute sécurité. Nous partons le lendemain dans le village pour trouver une voiture qui nous emmènera a Leh. Des dizaines de voitures ont été laisses la a l'abandon dans la précipitation...ou et comment sont parties ces personnes, personne n'est capable de nous dire et personne n'est plus disponible pour nous emmener et ce n'est plus une question de prix. Tout le monde a déserté les lieux par peur d'une nouvelle coulée de boue, ce n'est pas bon signe pour nous. Il va falloir trouver une solution...et la j'entends des hélicoptères, ils nous survolent, je leur fais des signes de SOS, ils ont l'air de se poser a cote. Je pose la question aux locaux, ou vont ils? On me répond a la base militaire... pourquoi ne m'avez vus pas dit qu'il y avait une base militaire avec un héliport juste a cote. C'est la course notre seule chance est de se rendre le plus rapidement possible a la base pour prévenir l'hélicoptère de notre présence et nous aurons peut etre la chance d'etre rapatries. Je panique pour trouver une voiture qui veut bien nous emmener en urgence, c'est tellement proche mais nous n'avons que quelques minutes devant nous... et bien entendu c'est toujours dans ces moments la que personne ne veut nous véhiculer. Je perds un peu patience, c'est comme si personne ne voulait nous aider, j'oblige donc une voiture de nous prendre. Arrives a la base, nous voyons que d'autres touristes sont la a attendre le rapatriement, les militaires nous sautent dessus nous demandant notre nationalité et notre passeport. Le gouvernement a donne l'ordre de rapatrier tous les touristes coinces dans la vallée dans la journée mais personne ne nous en avit averti. Nous avons quelques minutes pour aller récupérer nos affaires et monter dans le prochain hélicoptère. La galère est enfin terminée. Je suis passée par tous les états d'émotions en quelques heures...maintenant place au soulagement. Nous allons pouvoir enfin rentrer. Je suis folle de joie et contente d'avoir prise toutes ces décisions en temps et en heure sans lesquelles nous ne serions jamais rentrer à Leh. Tous ces mois de voyage m'ont appris à savoir quoi faire en situation d'urgence. J'ai écouté mon instinct et les conseils des locaux, il fallait partir de ce plateau au plus vite. Nous voilà maintenant à dire au revoir à notre guide, son assistant et notre cuisinier avec qui nous avons tissé des liens forts. J'ai le cœur serré de les laisser là, seuls. Ils vont devoir rentrer à pieds, l'hélicoptère est réservé aux touristes, aux blancs uniquement. Encore une fois nous sommes des privilégiés. Ca me révolte de toujours noter cette différence entre eux et nous, nous avons la chance d'être nés avec une peau blanche. Ça fait deux fois que j'abandonne des membres de l'expédition sur place, en situation dangereuse. Je ne supporte plus cette idée, nous étions une équipe soudée, ils nous ont protégés tout le long et je ne peux rien faire pour eux maintenant. Je n'ai pas eu de nouvelles des muletiers, j'espère qu'ils sont arrives a destination. Le vol en hélicoptère durera une petite heure seulement au dessus de la magnifique vallée, nous survolons la coulée de boue, les effondrements de la montagne, la route s'est complètement écroulée. Nous restons bouche bée devant le constat de la catastrophe, nous avons eu de la chance d'en sortir sains et saufs, les larmes me montent aux yeux.
J'ai l'impression de me rapprocher de Dieu encore une fois...ou de m'en éloigner, je ne sais plus trop avec ce sentiment d'injustice. Pourquoi les pauvres sont toujours les plus touches? Toutes ces catastrophes qui les enfoncent dans leur malheur, non ce n'est pas juste. Ils se battent tellement fort avec tellement de courage pour essayer de survivre et de donner la vie, pourquoi cette force, cette générosité n'est pas récompensée a sa juste valeur? Ce voyage m'apprend toujours énormément mais me rend parfois amère et me renferme sur moi. J'ai l'impression de voir ce que mes proches ne voient pas ou ne veulent pas voir. Je vois mieux, mais je ne peux pas agir... et Dieu ne semble pas agir pour eux, pourtant ils le ou les vénèrent depuis des générations. Nous arrivons à Leh sous les projecteurs, la presse nous accueille sous les flashs ... on dirait de la propagande pour mettre en valeur l'armée indienne. J'essaie de ne pas plus m'ecoeurer et de ne pas faire attention avec ces gens qui ne se rendent compte de rien...l'émulation est palpable a l'aéroport, nous sommes une dizaine de touristes a avoir été rapatries aujourd'hui, nous avons eu de la chance. Sur la route pour l'hôtel, nous constatons une fois de plus les dégâts, les arbres, les maisons ont été arraches par la coulée de boue qui recouvre tout. Je ne supporte plus les réflexions d'Émeric, il est a cote de la plaque. Tout ce qu'il trouve a dire devant le détresse évidente de la ville et de ces habitants c'est : « Je vais enfin pouvoir me racheter un pantalon ». Je me tais mais je n'en pense pas moins, je me suis éloignée de lui, nous ne nous comprenons plus et cette expérience nous a déchiré au lieu de nous souder. Je savoure le confort de l'hôtel. Nous avons bien mérité notre douche. Je suis exténuée de toutes ces émotions, toutes ces décisions a prendre. Je ressens le besoin d'être en sécurité et au calme mais nous devons passer à l'agence pour réorganiser la suite de notre séjour et les avertir de notre retour. Ils sont surpris de nous voir débarqués, c'est certain que ce n'est pas grâce à eux si nous sommes rentrés si vite et sains et saufs...bref après tout c'est le résultat qui compte, et ils ont l'air tellement soulagés de nous voir. Ils nous promettent de nous trouver rapidement un vol pour rentrer à Delhi, c'est désormais la priorité mais nous ne sommes pas les seuls à être sur la liste d'attente. Nous devrons donc attendre 4 jours avant le 1er vol disponible. Nous les passons à nous reposer, manger et dormir. Une fois nos forces retrouvées, nous décidons d'apporter notre aide en tant que volontaire pour aider la population en détresse. Une épidémie de choléra menace, la chaleur est revenue et l'eau stagne... l'eau potable se fait rare, les rivières en crue ont débordées dans les canalisations. Les associations humanitaires venues en renfort distribue des masques a la population et aux volontaires qui déblaient les maisons. Nous déblayerons une école remplie de boue a mi hauteur pendant toute la journée, un travail a la chaine, a se passer les sauts de boue. Nous sommes peut être une trentaine de personnes a apporter notre aide ici, mais il faudra plus d'une semaine de travail pour pouvoir rouvrir l'école. La coulée de boue a surpris les habitants de Leh durant la nuit du 5 septembre, heureusement les enfants n'étaient pas la... nous n'avons pas le risque de découvrir un corps sous la boue.
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Au Tso Kar, nous rejoignons du monde, une dizaine de tentes au moins sont déjà plantées quand nous arrivons. Les équipes de trek sont coincées par les pluies, les rivières sont maintenant trop hautes pour être traversées et nous permettre d'atteindre le fameux lac du Tso Moriri. Nous attendons le lendemain pour aviser, les informations sont assez unanimes, impossible de rejoindre le Tso kar et même impossible de faire demi tour les rivières ont gonflées pendant la nuit. Les routes sont également coupées emportées par les coulées de boue. Nous somme donc coincés sur notre plateau sans aucune possibilité d'avancer ni de reculer. L'ascension n'est bien entendu pas recommandée, nous annulons le reste du trek. Notre préoccupation consistera à trouver un moyen de rentrer. Heureusement, nous avons les moyens de survivre pendant plusieurs jours et il nous reste encore assez de gaz. Nous avons maintenant tout le temps de bavarder avec les autres équipes de trek, c'est là que nous apprenons la catastrophe et le nombre de disparus qui passe de 200 à 600 en une journée. Un des guides a un téléphone satellite et nous demande notre nom pour informer l'ambassade de notre localisation. L'ambassade française commence a se préoccuper du nombre de français disparus. Mais, il ne veut pas se servir de son téléphone pour autant et nous trouver un moyen de rentrer a Leh ou ailleurs... ils partiront en voiture, sans nous informer de quoi que ce soit. Nous voilà sans voiture de disponible, ni téléphone. Nous ne paniquons pas encore, nous n'avons pas conscience du risque et n'avons pas encore eu le temps de nous impatienter. Le lendemain, nous partons avec le guide dans le village le plus près d'ici (c'est à dire a deux heures de mules) pour trouver un téléphone satellite et peut être une voiture. Shanti m'informe de la réalité de la situation a Leh, les disparus sont sous les décombres, une coulée de boue a emporté la banlieue pauvre du sud ne faisant qu'une bouchée des maisons de fortune. Les moyens de communication avec Dehli sont très mauvais et par conséquent l'aide, le ravitaillement et les soins médicaux sont limités. Le Choléra menace de pointer son nez pour clouer le spectacle. L'ambassade française a été mise au courant, on nous cherche, je redonne notre situation, loin d'être alarmante pour eux, nous pouvons attendre... je leur fais comprendre que Céline a sans doute besoin de redescendre en altitude pour se sentir mieux mais je ne pense pas qu'ils prennent notre cas au sérieux. Ils me promettent une voiture, mais pour quand? Il faut que ce soit moi qui fasse l'effort de revenir refaire mes 2 heures de mule pour téléphoner demain si je veux en savoir plus. Je pense qu'ils nous sont inutiles, avec le guide nous sommes a présent persuades qu'ils faut que nous nous débrouillons tous seuls, ce n'est pas l'agence à Leh, encore moins celle de Dehli qui va nous aider. Nous rentrons bredouille et croisons des chevaux sauvages qui courent dans ce haut plateau, c'est d'une beauté ahurissante. Le soleil cogne, la lumière est aveuglante, les mules s'épuisent a s'enfoncer dans la boue stagnante. A notre arrivée au camp, que de mauvaises nouvelles a annoncer si ce n'est que le téléphone marche et que nous avons informe l'agence de notre situation. La soirée sera plus decontractee, les pluies diluviennes se sont enfin arrêtées, nous nous sentons un peu plus en sécurité, l'eau a arrêté de monter. Nous décidons de repartir téléphoner demain au village, pour essayer de trouver une voiture. Il faut que l'on bouge d'ici, nous n'avons plus beaucoup de gaz. Le lendemain rebelote, re-mule, re-telephone a l'agence qui n'a bien entendu pas trouvé de voiture a nous envoyer...déception, nous devons encore attendre. Nous perdons confiance en l'agence et decidons de nous débrouiller par nous même pour gagner du temps.
En sortant du village, nous trouvons une voiture, garée là, nous discutons avec les villageois pour trouver le propriétaire et négocier un retour. La voiture n'a pas assez d'essence pour retourner à Leh...une moto est également là mais le propriétaire refuse de faire le trajet pour nous... à la rigueur (vu notre appel au secours), il accepterait de déposer notre guide sur la grande route pour qu'il puisse arrêter une autre voiture. C'est notre seule solution. Je me prépare a rentrer sans mon guide en lui souhaitant bon courage d'attendre le long d'une route sous un soleil de plomb et sans eau...et là deux voitures arrivent sur la route comme par miracle. Nous courons à leur rencontre, il ne faut pas les laisser passer. Les voitures s'arrêtent. La première est une voiture de police qui ne souhaite pas vraiment nous secourir, ils ne sont pas très informés de la situation. Mais heureusement, l'autre veut bien nous emmener si nous payons son prix. Cependant, il ne sait pas son prix, il faut qu'il réfléchisse, pas fou... c'est l'occasion rêvée de faire de l'argent, je crois que nous sommes de toutes les façons prêts a payer pour sortir de cette impasse. Nous négocions tout de même un prix tres raisonnable finalement ...compte tenu de la situation, de l'état de la route, de la tonne de matériel a emmener...yes, nous sommes sauves, Merci d'être passe par la. Nous laissons les mules et rentrons en voiture. Notre arrivée au camps est applaudie. Nous chargeons les affaires, faisons nos adieux aux muletiers qui vont couper dans la montagne par le sud...et traverser les rivières, les courageux, nous n'oublions pas de les remercier et de leur donner leur pourboire avant de partir en direction de Rumtse, la route doit être réouverte. Le trajet est rude, la voiture est beaucoup trop chargée. Nous devons nous arrêter sur la grande route pour prendre une 2eme voiture et décharger la 1ere. Nous croisons les gars qui font les travaux pour refaire la route qui s'est complétement écroulée. Ils travaillent dans des conditions extrêmes en dormant dans des tentes de fortunes a plus de 5 000 mètres d'altitude. Nous arrivons le soir a Rumtse, heureux de retrouver un lit et des murs. Je repense a ces muletiers toute la nuit, nous les avons laisser sur ce plateau seuls, pourvu qu'ils trouvent un chemin pour rentrer chez eux en toute sécurité. Nous partons le lendemain dans le village pour trouver une voiture qui nous emmènera a Leh. Des dizaines de voitures ont été laisses la a l'abandon dans la précipitation...ou et comment sont parties ces personnes, personne n'est capable de nous dire et personne n'est plus disponible pour nous emmener et ce n'est plus une question de prix. Tout le monde a déserté les lieux par peur d'une nouvelle coulée de boue, ce n'est pas bon signe pour nous. Il va falloir trouver une solution...et la j'entends des hélicoptères, ils nous survolent, je leur fais des signes de SOS, ils ont l'air de se poser a cote. Je pose la question aux locaux, ou vont ils? On me répond a la base militaire... pourquoi ne m'avez vus pas dit qu'il y avait une base militaire avec un héliport juste a cote. C'est la course notre seule chance est de se rendre le plus rapidement possible a la base pour prévenir l'hélicoptère de notre présence et nous aurons peut etre la chance d'etre rapatries. Je panique pour trouver une voiture qui veut bien nous emmener en urgence, c'est tellement proche mais nous n'avons que quelques minutes devant nous... et bien entendu c'est toujours dans ces moments la que personne ne veut nous véhiculer. Je perds un peu patience, c'est comme si personne ne voulait nous aider, j'oblige donc une voiture de nous prendre. Arrives a la base, nous voyons que d'autres touristes sont la a attendre le rapatriement, les militaires nous sautent dessus nous demandant notre nationalité et notre passeport. Le gouvernement a donne l'ordre de rapatrier tous les touristes coinces dans la vallée dans la journée mais personne ne nous en avit averti. Nous avons quelques minutes pour aller récupérer nos affaires et monter dans le prochain hélicoptère. La galère est enfin terminée. Je suis passée par tous les états d'émotions en quelques heures...maintenant place au soulagement. Nous allons pouvoir enfin rentrer. Je suis folle de joie et contente d'avoir prise toutes ces décisions en temps et en heure sans lesquelles nous ne serions jamais rentrer à Leh. Tous ces mois de voyage m'ont appris à savoir quoi faire en situation d'urgence. J'ai écouté mon instinct et les conseils des locaux, il fallait partir de ce plateau au plus vite. Nous voilà maintenant à dire au revoir à notre guide, son assistant et notre cuisinier avec qui nous avons tissé des liens forts. J'ai le cœur serré de les laisser là, seuls. Ils vont devoir rentrer à pieds, l'hélicoptère est réservé aux touristes, aux blancs uniquement. Encore une fois nous sommes des privilégiés. Ca me révolte de toujours noter cette différence entre eux et nous, nous avons la chance d'être nés avec une peau blanche. Ça fait deux fois que j'abandonne des membres de l'expédition sur place, en situation dangereuse. Je ne supporte plus cette idée, nous étions une équipe soudée, ils nous ont protégés tout le long et je ne peux rien faire pour eux maintenant. Je n'ai pas eu de nouvelles des muletiers, j'espère qu'ils sont arrives a destination. Le vol en hélicoptère durera une petite heure seulement au dessus de la magnifique vallée, nous survolons la coulée de boue, les effondrements de la montagne, la route s'est complètement écroulée. Nous restons bouche bée devant le constat de la catastrophe, nous avons eu de la chance d'en sortir sains et saufs, les larmes me montent aux yeux.
J'ai l'impression de me rapprocher de Dieu encore une fois...ou de m'en éloigner, je ne sais plus trop avec ce sentiment d'injustice. Pourquoi les pauvres sont toujours les plus touches? Toutes ces catastrophes qui les enfoncent dans leur malheur, non ce n'est pas juste. Ils se battent tellement fort avec tellement de courage pour essayer de survivre et de donner la vie, pourquoi cette force, cette générosité n'est pas récompensée a sa juste valeur? Ce voyage m'apprend toujours énormément mais me rend parfois amère et me renferme sur moi. J'ai l'impression de voir ce que mes proches ne voient pas ou ne veulent pas voir. Je vois mieux, mais je ne peux pas agir... et Dieu ne semble pas agir pour eux, pourtant ils le ou les vénèrent depuis des générations. Nous arrivons à Leh sous les projecteurs, la presse nous accueille sous les flashs ... on dirait de la propagande pour mettre en valeur l'armée indienne. J'essaie de ne pas plus m'ecoeurer et de ne pas faire attention avec ces gens qui ne se rendent compte de rien...l'émulation est palpable a l'aéroport, nous sommes une dizaine de touristes a avoir été rapatries aujourd'hui, nous avons eu de la chance. Sur la route pour l'hôtel, nous constatons une fois de plus les dégâts, les arbres, les maisons ont été arraches par la coulée de boue qui recouvre tout. Je ne supporte plus les réflexions d'Émeric, il est a cote de la plaque. Tout ce qu'il trouve a dire devant le détresse évidente de la ville et de ces habitants c'est : « Je vais enfin pouvoir me racheter un pantalon ». Je me tais mais je n'en pense pas moins, je me suis éloignée de lui, nous ne nous comprenons plus et cette expérience nous a déchiré au lieu de nous souder. Je savoure le confort de l'hôtel. Nous avons bien mérité notre douche. Je suis exténuée de toutes ces émotions, toutes ces décisions a prendre. Je ressens le besoin d'être en sécurité et au calme mais nous devons passer à l'agence pour réorganiser la suite de notre séjour et les avertir de notre retour. Ils sont surpris de nous voir débarqués, c'est certain que ce n'est pas grâce à eux si nous sommes rentrés si vite et sains et saufs...bref après tout c'est le résultat qui compte, et ils ont l'air tellement soulagés de nous voir. Ils nous promettent de nous trouver rapidement un vol pour rentrer à Delhi, c'est désormais la priorité mais nous ne sommes pas les seuls à être sur la liste d'attente. Nous devrons donc attendre 4 jours avant le 1er vol disponible. Nous les passons à nous reposer, manger et dormir. Une fois nos forces retrouvées, nous décidons d'apporter notre aide en tant que volontaire pour aider la population en détresse. Une épidémie de choléra menace, la chaleur est revenue et l'eau stagne... l'eau potable se fait rare, les rivières en crue ont débordées dans les canalisations. Les associations humanitaires venues en renfort distribue des masques a la population et aux volontaires qui déblaient les maisons. Nous déblayerons une école remplie de boue a mi hauteur pendant toute la journée, un travail a la chaine, a se passer les sauts de boue. Nous sommes peut être une trentaine de personnes a apporter notre aide ici, mais il faudra plus d'une semaine de travail pour pouvoir rouvrir l'école. La coulée de boue a surpris les habitants de Leh durant la nuit du 5 septembre, heureusement les enfants n'étaient pas la... nous n'avons pas le risque de découvrir un corps sous la boue.
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