Le 23/12/11, 5:01
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C’est aujourd’hui le branlebas de combat à CENPRODIC. En effet, nous avons réuni tous les employés de l’ONG dans les infrastructures de Sta Ana pour effectuer un grand nettoyage de printemps (et oui, ici, à cette époque c’est le printemps). Nous attendons environ 20 personnes pour venir nous prêter main forte. Et vu l’état de désolation de notre jardin qui s’apparente bien plus à un terrain vague, ce ne sera pas du luxe. Seul petit hic : la pluie, elle, ne l’entend pas de cette oreille et a bien décidé de nous mettre des bâtons dans les roues.
Une fois toute la troupe au complet, il faut se répartir les tâches. Il n’est pas facile de motiver ce petit monde qui n’a clairement pas envie de se mouiller. C’est incroyable à quel point on fait toute une histoire avec la pluie ici. Habituée au climat belge, cela fait longtemps que je me suis fait une raison à ce niveau: s’il faut reporter un truc à chaque fois qu’il pleut autant ne plus rien faire. Heureusement, Erland prend les choses en main et propose dans un premier temps de vider les dernières petites maison du fond de la propriété pour faire l’inventaire de tout ce qu’on y trouve avant de tout entreposer ailleurs. Ainsi, nous libérons de la place pour les futurs concierges de l’hospedaje.
Même s’il faut être derrière eux à tout moment, la plupart de collaborateurs de CENPRODIC se mettent à l’ouvrage. Seul un petit groupe d’irréductibles tire-au-flanc (les ingénieurs de Maras en premier) sont impossible à mobiliser. Quand il faut donner des ordres, il n’y a pas de problème, ils sont là. Mais lorsqu’il faut mettre la main à la pâte, c’est une autre paire de manches. Bien qu’on leur ait confié des tâches, ils ne décollent pas de l’endroit où se prépare le barbecue de midi. Comment n’ont-ils pas honte de se la couler douce pendant que les autres s’activent ?
La répartition des tâches s’est faite de façon tout à fait naturelle : les hommes dans les entrepôts et les femmes aux fourneaux. Enfin, sauf moi qui préfère porter meubles et matériaux de construction avec les hommes que de me cantonner à préparer le repas. Serait-ce par militantisme féministe ou par simple aversion pour la cuisine ? Probablement un peu des deux...
Pendant ce temps, bien au chaud (ou du moins au sec), Waël et Jimmy planchent sur le prototype de chauffage d’eau à énergie solaire. Les deux ont l’air de s’entendre comme larrons en foire. Au-delà du financement des projets de CENPRODIC, le centre de logement de Sta Ana a également pour vocation de favoriser les échanges entre les voyageurs, créer des synergies autour d’une même vision de solidarité Nord-Sud. Voir ainsi collaborer le Péruvien et le Français fait donc chaud au cœur. A ce niveau, nous sommes sur la bonne voie.
Vers midi, nous nous retrouvons tous près du feu du barbecue afin de nous sécher un peu. Guillermo s’improvise barman et sert à chacun un petit verre de Rhum Coca bien tassé. Lorsque certains se plaignent du mélange trop corsé, il répond qu’il nous faudra bien cela pour nous réchauffer. On installe ensuite une grande plaque métallique circulaire qui nous servira de grille de barbecue. La cuisson peut commencer. Au menu, saucisses, poulet, côtelettes de porc et pomme-de-terres. En notant l’absence de légumes, je ne peux m’empêcher de penser à Kamel qui se plaint déjà de nos barbecues belges ou du Nord de la France essentiellement carnivores. Ici, c’est encore l’échelon au-dessus. Mis à part cela, le repas est délicieux et bien arrosé. A voir se détériorer au fil des verres l’état de mes collègues, mes espoirs que l’on reprenne le travail pour s’attaquer au nettoyage du jardin s’évanouissent peu à peu.
Et je ne vaux pas mieux que les autres. Lorsque Waël nous amène quelques amis français, je n’en mène pas large. Je dois jouer les relations publiques, présenter notre travail et discuter d’éventuelles possibilités de volontariat pour certains d’entre eux. Pas facile, facile avec un petit verre dans le nez... Mais je crois que nos visiteurs sont indulgents et comprennent la situation. Et puis, eux aussi ont droit à une petite bière.
Waël et ses amis finissent par prendre congé de nous. Le temps de danser est arrivé. Et comme la gente féminine a peu de représentantes, nous sommes particulièrement sollicitées. Je suis invitée à danser par tous les membres fondateurs de l’ONG. De par le passé, mes collègues m’avaient demandé à plusieurs reprises mes critères en matière d’homme. Exaspérée par les maintes réitérations de la question, j’avais fini par répondre « vieux et friqué ». Me voyant donc danser avec tous ces hommes d’un âge certains, Erland et Goyo me lancent avec un clin d’œil complice « alors, Sophie, on prospecte... ».
Les petits vieux sont relativement indulgents avec ma maîtrise approximative du Huayno. Ils me laissent faire un peu n'importe quoi sans se permettre de commentaires. Il faut dire que dans la bande, Erland est le seul qui danse réellement bien. Et, pour me les avoir appris à la première semaine de mon arrivée, lui, sait que je connais les pas. Avec lui, pas question de me défiler et de me contenter de faire de la figuration. Il s’agit de respecter les règles de l’art. L’occasion de me rappeler à quel point cette danse est fatigante. Cela finit par m’achever...