Destination Groenland

Après une escale à Houat (petite étape agréable), nous sommes repartis dans la brume vers la Vilaine...
Nous avons donc à contrecœur ressorti nos bottes et nos cirés!

Mais le temps a fini par s'améliorer, en approchant de l'embouchure de la Vilaine.

Nous avons remonté la rivière jusqu'à Arzal, ou nous sommes arrivés 15mn trop tard pour l'éclusage de 18h.
Pas grave, nous avons attendu 20h, puis nous avons continué notre chemin dans l'eau douce, au milieu des forêts et des hérons!

Arrivée à Folleux.
C'est fini!

Photos à venir sous une semaine!

"Qui voit Ouessant, voit son sang
Qui voit Sein, voit sa faim
Qui voit Groix, voit sa joie."

Nous sommes donc joyeux, à Loc Maria, au Sud Est de Groix!

Frédéric a proposé hier soir de partir à 6h30, à cause des courants etc etc, mais devant mes soupirs et les cernes qu'il se voyait dans la glace, il a fini par décider que 0,5 nœuds de courant contraire, après tout, ce n'était pas grand chose.

Nous avons fait la grasse matinée (jusqu'à 8h30), puis nous sommes partis tranquillement vers le Sud.

La météo annonçait du Nord Est et un régime de brise côtière, c'est bien ce que nous avons eu... Avec, au passage entre les Glénan et la côte, un vent qui n'en finissait pas de varier en force et en direction (pour se mettre face à nous bien entendu!).

Nous avons enroulé et déroulé le génois au moins 4 fois en l'espace de deux heures !

Mais après les Glénan, ça s'est arrangé, et nous avons pu aller jusqu'à Groix, qui était quand même assez loin (nous sommes arrivés à 22h).

Nous avons vu un troupeau de globicéphales, près des Glénan! Frédéric n'en avait jamais vu en Bretagne, et moi je n'en avais jamais vu tout court.
C'est entre le dauphin et la baleine... Il y en a même un qui s'est approché et qui est passé sous la coque!
Mais ils sont assez sauvages et ne s'intéressent pas vraiment aux bateaux.

Nous avons également vu quelques dauphins, cela devient d'une banalité... Ils ne sont pas restés longtemps, il y avait beaucoup d'autres étraves à visiter!

Il faut dire que la Bretagne, en terme de plaisance, ce n'est ni l'Ecosse, ni l'Irlande...
Il y a sur l'eau des tas de bateaux, à moteur et à voile, et j'ai passé la moitié de mon temps de barre à éviter tous les voiliers que l'on croisait, tous tribord amure (et donc prioritaires).

Et Frédéric râle.
Les râleurs, ça me met de mauvaise humeur...

En tout cas, il fait beau, alors moi je ne me plains pas!
J'ai pu ranger gore-tex, thermolactyl, polaire i4 et autres technologies textiles, très utiles mais quand même encombrantes, au fond de mon coffre ; et sortir le short que j'avais emporté à tout hasard, sur les conseils de Michael.

Et malgré toute la crème solaire que j'ai mis, je suis aussi rouge qu'une bouée et je brille dans la nuit. Les navires risquent de me prendre pour l'entrée d'un chenal!

A part ça, la traversée... Fatiguante... J'étais un peu grognon sur la fin, la fatigue j'imagine. Au matin, le vent a forci, la mer aussi, je me tordais les poignets et les genoux sans réussir à garder mon cap, j'injuriais dans ma barbe Frédéric, son bateau, et sa maudite barre à roue qui me faisait faire des tours et des tours, un coup dans un sens, un coup dans l'autre...

Et hier soir, sur mon quart, on a hissé le spinnaker.
Le spi... C'est une grande, grande voile d'avant, qui peut remplacer le génois par vent faible au grand largue (pour un spi asymétrique).

Une voile susceptible : si l'on lofe un peu trop, elle fait des larmes.
Abattre un peu pour la consoler.
Lorsque vous avez trop abattu, elle se cache derrière la grand voile : pour la faire sortir de sa cachette, lofer jusqu'à la faire pleurer.
Et recommencer.

Alors voilà la théorie... En pratique, la plus petite houle détraque tout et l'on ne peut plus de fier à ces règles simples.

J'ai donc passé tout mon quart hyper concentrée, d'autant plus que si l'on fait une erreur de barre de plus de 10 degrés, elle se froisse et fait de grand claquements, si bien que tout l'équipage est au courant que le barreur est un incapable!

Ce qui m'a empêché de manger ma soupe et de voir le soleil de coucher dans mon dos...
J'étais grognon.

Et l'affalage n'a rien arrangé : il faut se mettre vent arrière, mais sans empanner... Évidemment, j'ai empanné parce que je ne suis qu'une débutante, Frédéric a râlé, je n'aime pas ça!

Heureusement, c'était la fin de mon quart, je suis allée me remplir l'estomac (sans oublier de verser la moitié de ma soupe sur ma couchette à cause d'un méchant coup de gîte) et dormir un peu.
Enfin, essayer, le vacarme d'Evinrude l'éolienne n'aidant pas.

Mais bon comme toujours, le soleil arrange tout, et quand il s'est levé sur un ciel sans nuages, tout allait mieux.

Nous avons quand même dû allumer le moteur un peu, parce que le vent menaçait de nous abandonner et de nous faire rater le moment favorable pour passer le fameux Raz.

Passé sans difficultés par ailleurs, dans des conditions favorables, il n'y a rien d'impressionnant.

Et voilà! Nous sommes arrivés à Audierne, après 27 heures de navigation. Épuisés. La sieste avant d'aller à la recherche de douches!

Nous sommes donc partis dimanche matin, à peine 24h après être arrivés aux Scilly.

C'est un peu dommage de n'être passés qu'en coup de vent, ces îles sont vraiment magnifiques, et par ce grand beau temps, c'est sublime.
Bon, tant pis, je reviendrai!

Cap au 150, nous voilà en route pour la Bretagne!

Décider de l'heure du départ fut compliqué, car voyez-vous, il fallait partir peu après la pleine mer de Tresco (5:10, se lever à 4h ne nous réjouissait pas...), mais si l'on voulait passer Ouessant avec le courant favorable, et même continuer et passer le Raz de Sein dans la foulée, il ne fallait pas se présenter trop tôt.

Eh oui, les Raz, c'est ponctuel. Avant l'heure, c'est pas l'heure, après l'heure, c'est plus l'heure!

Bref les calculs de Frédéric se sont révélés juste, puisque nous avons fait la route espérée.

La traversée s'est bien passée, avec du vent et du soleil.
Pas beaucoup de cargos, quelques voiliers. Un bateau des Glénans qui montait aux Scilly.

Cette fois, pas de dauphins, mais nous avons eu un la visite d'un... Pigeon voyageur!

Je ne savais pas que cela existait toujours!

Un pigeon bien gras et bien dodu, la plume bien entretenue, s'est posé à côté de Frédéric, avec des bagues aux pattes.
Pas farouche, nous lui avons donné de l'eau et il s'est installé sur la banquette bâbord du cockpit.

C'était poétique, c'était mignon... Jusqu'à ce qu'il commence à ch... partout, et à essayer de rentrer dans le bateau!
(Tentative d'ailleurs couronnée de succès, qui m'a fait lui courir après dans tout le bateau pendant que Frédéric se tordait de rire à la barre)

Comme invité, on a vu plus poli.
Au bout de 5h, nous l'injonctions de se remettre en route, sans succès.
Il se mit à roucouler de manière menaçante, qu'est-ce qu'il a encore celui-là?

Et là, j'ai aperçu... Un deuxième pigeon, pareillement bagué!
Une pigeonne, plutôt, plus fine que notre compagnon.
Encore moins farouche, elle est montée sur mes genoux pour venir picorer ma bouteille d'eau!

Donc ces deux pigeons se sont installés dans un coin du bateau, et heureusement n'en ont plus bougés et ont continuer à fienter sur place. Nous avons réussi à sauver la banquette tribord!

Petit à petit, ils se sont endormis, blottis l'un contre l'autre... Ils étaient meugnons!

Nous n'avons pas essayé de lire le messages: Frédéric avait essayé dans le passé, ce n'étaient qu'une succession de chiffres et de lettres.

Au petit matin, ils étaient toujours là, alors que l'on longeait la côté depuis un moment déjà! Bande de paresseux!
On a bien compris, les pigeons voyageurs : oui, ils parcourent des kilomètres, oui, ils ont le sens de l'orientation... Tu parles!!! Ils abordent le premier bateau venu et roupillent jusqu'à l'arrivée, oui!

Frédéric à fini par les mettre dehors sans cérémonie, histoire de récupérer nos banquettes. On les a vite perdus de vue...

7h du matin, nous arrivons aux îles Scilly.

Îles Sorlingues, en français, paraît-il.

Après avoir guetté une fenêtre météo, nous sommes finalement partis de Milford Haven au moteur.
Pas de vent, c'est toujours mieux que de la pluie, alors profitons du beau temps plutôt que de croupir au pays de Galles.

Nous avons avancé à la voile environ 1h... Et tout le reste au moteur. 110 milles en tout, 21h de navigation.

Durant la journée, nous sommes passés dans des bancs de brume, c'était étrange... On les apercevait d'abord au loin, des nuages sur l'eau, puis on se rapprochait et l'on voyait de la vapeur courir sur l'eau... Jusqu'à ce que l'on y voie plus grand chose. Et puis tout d'un coup, le soleil perçait et il faisait de nouveau beau!

Après ça, nous avons vu... Des dauphins!
Des dauphins, des dauphins, encore des dauphins!
Plusieurs troupeaux sont venus jouer avec le bateau, au moins quatre fois, mais la troisième fois, il y en avait une cinquantaine!!!
Des dauphins partout, bâbord, tribord, à la proue, à la poupe! Et ça sautait, et ça sifflait, et ça faisait des éclaboussures!
Et on voyait sans cesse de nouveaux troupeaux arriver de toutes les directions!

Notre petit bateau était le centre de toutes les attentions. On aurait dit qu'ils n'avaient pas vu de bateau depuis des lustres, et qu'ils se bousculaient pour venir jouer autour de nous!

Ils nageaient à l'étrave, zigzaguaient, droite gauche droite gauche, et que je m'avance devant pour sauter, et que je tourne sur moi même, et que je te montre mon ventre, et que j'ouvre la gueule comme pour sourire!

Ils faisaient même des figures de natation synchronisée, nageant ventre contre ventre à deux ou à trois, sautant tous ensemble ou l'un après l'autre...

Bref, c'était magique!

J'ai pris un million de photos, et même des vidéos, je vous montrerai ça dès que possible.

Après ça, le soleil s'est couché dans un incendie de nuages, et les étoiles de sont allumées une à une.
J'ai bien reconnu la Grande Ourse et Cassiopée, mais mes compétences s'arrêtaient là.
Un peu avant la fin de mon quart, Frédéric à surgi dans le cockpit avec une lampe de poche et un "mini ciel" : regarde là c'est la polaire, là c'est Arcturus, le mini ciel ça marche comme ça, amuse toi bien je reviens dans 1/2 heure!

Alors voilà, le nez dans les étoiles, je me suis appliquée à reconnaître toutes ces étoiles et constellations dont les noms font rêver :
Arcturus du bouvier, à côté la Couronne, Venus, au sud Antarès du Scorpion, la Vierge et l'Epi, le triangle des nuits d'été : Véga de la Lyre, Deneb du Cygne et Altaïr de l'Aigle...

Et un peu plus tard, dans mon quart de 2h-4h, le ciel avait un peu changé : à la place du Scorpion il y avait le Sagittaire et le Capricorne, et derrière moi de trouvait la fameuse Algol, d'après laquelle sont nommés quelques bateaux...

Voilà, avec toutes ces étoiles, des soupes, et encore des dauphins qui sont venus nager avec le bateau, j'ai bien occupé mes quarts. Sans parler bien sur des cargos à surveiller, et du phare à repérer.

Vers 4h déjà, quand je suis retournée me coucher, on sentait les Scilly : elles sentent la marée.
Comme la Bretagne, dit Frédéric.
En tout cas, ce n'est plus l'Irlande paysanne qui sentait le fumier, ni l'Ecosse sauvage qui sentait la tourbe... On est presque arrivés.

Et puis 6h, grand ciel bleu, les Scilly toutes proches.
Nous étions toujours au moteur, la mer était d'huile.
Très jolie lumière sur les îles et les récifs, c'est beau... C'est vrai que ça ressemble un peu aux Glénans. En plus haut sur l'eau.

Et voilà! Nous avons mouillé l'ancre, et hop, au lit!

Samedi donc, nous avons passé la journée à Tresco, une des îles des Scilly.
La plus jolie, d'après Frédéric!

Nous avons débarqué avec l'annexe dans une eau turquoise, sur une plage de sable blanc, et avons fait le tour de l'île en passant par ses ruines de canonnières, en hauteur, puis par le village (1 boutique, 1 poste, 1 office du tourisme), et enfin Frédéric m'a indiqué le chemin pour aller visiter le jardin tropical, qu'il connaît déjà.

En effet, depuis la fin du 19ème siècle, le propriétaire de l'île faisait ramener de toutes les expéditions anglaises coloniales des plantes de tropicales ou méditerranéennes!

Malheureusement, le jardin fermait à 16h, je n'ai pas pu le visiter. Mais le reste de l'île en donnait un petit aperçu : des palmiers, des plantes grasses, des oiseaux de paradis, des fleurs de toutes les couleurs...

Et toujours entouré de cette eau turquoise!

C'était magnifique, un peu comme les Glénans, mais plus grand, avec en plus l'amour anglo-saxon des jardins bien entretenus !

Le soir, nous sommes allés boire une bière au pub (une bière des Scilly bien évidemment), d'où nous avons pu voir la météo : du vent de Nord Est, parfait! Mais qui risque de tourner : nous partirons donc le lendemain.

Nous sommes à Milford Haven, au pays de Galles.
Nous avons traversé hier, en 15h, depuis Arklow, la météo ayant eu l'air de dire que nous aurions du vent d'ouest.

Mais cette mer d'Irlande, franchement, elle commence à me taper sur les nerfs... Les différentes météos que l'on obtient (BBC, France inter, navtex, internet) sont toutes divergentes, et il n'y en a pas une de juste!

Bref, donc nous sommes partis avec un peu de vent, qui n'a pas arrêté de changer.
On a eu un moment de grand ciel bleu, puis tout d'un coup on s'est retrouvés sous du grand ciel gris, avec de la brume et du crachin!

Une brume assez épaisse, on n'y voyait pas à 1/2 mille, on devinait tout juste les rouleaux qui s'écrasaient sur les falaises des îles autour de nous... Un peu intimidant.
Mais avec le radar, pas de problèmes, et nous avons fini par arriver dans encombre au chenal de Milford Haven.

Et là, on s'est tout d'un coup retrouvés entre des lumières rouges, vertes, blanches, et la corne de brume du phare!
C'est plus aigu que ce que j'imaginais, on aurait dit un "La", comme dans le téléphone.

Voilà, on a fini par mouiller l'ancre au bout de 15h de navigation, pas loin des norvégiens, qui ont pris la même route que nous mais avec leur super bateau, ils étaient arrivés bien avant!

Aujourd'hui, il fait beau, et le petit village en face duquel nous sommes ancrés est très joli sous le soleil. On s'approche du sud : il y a des palmiers!

On s'ennuie...

Nous sommes à Arklow, environ 60 milles au sud de Dublin, toujours en Irlande.
Nous avons fait la route hier : lever 5h du matin pour avoir le courant avec nous.
Évidemment, les courants et les marées, c'est toujours à des horaires pas possible!

Bref, ça nous a quand même bien aidé, nous avons avancé à 9 nœuds tant qu'il y avait du vent.
Après, le vent s'est mis en face de nous, donc Frédéric avait le moteur, car si nous restions là trop longtemps, la renverse du courant nous aurait fait reculer!

Arrivés a Arklow, comme après chaque étape, une fois que nous nous sommes réchauffés avec le ventre plein, nous nous sommes endormis.
C'est toujours pareil, dès qu'on s'arrête on a faim, et dès qu'on mange on a envie de dormir! C'est très basique.

Nous avons rencontrés deux suédois, enfin, deux personnes de moins de 50 ans!!!
Nous sommes allés boire un verre au pub, mais en ce lundi soir, il n'y avait que nous.
Cette ville n'est ni vivante, ni intéressante.

Et aujourd'hui, il pleut des chats et des chiens... Et il vente terriblement.
Donc nous restons aux abris, comme prévu.

Mais on commence à s'ennuyer... A faire sans arrêt des pauses comme ça...
Surtout que la météo ne s'arrange pas pour encore plusieurs jours, apparemment.
On est pas encore arrivés.

J'ai toujours mes petites croix et mes livres, mais au bout d'un moment on tourne en rond.

La sortie de la journée sera au centre commercial juste à côté... On achètera peut être de quoi faire un gâteau...

Je ne sais pas si j'oserai retourner au douches, lugubres dans un bâtiment abandonné, et à peine tièdes!
Pour 30€ la nuit ils pourraient faire un effort!