la banane a velo

PAINAN / TAPAN / IPUH
303 KM ( 4462 KM )
Depuis Padang , là ou je passe je suis chaleureusement salué . Les encouragements d un coup de klaxon , d un coucou de la main ou du doigt , le pouce je précise , sont innombrables . Les "hello mister" fusent de droite et de gauche , des champs , des maisons , des bus , des arbres , de partout , de nul part et meme de plus loin . A mon passage , dans les écoles les enfants viennent s amasser le long des murets pour m ovationner . D autres jeunes m accompagnent en courant à mon coté jusqu'à perdre haleine . Je suis plus célébré que le pape François lors de sa première apparition place Saint-Pierre de Rome . C est un peu gènant mais très bon pour les mollets . Je n entend pas grand chose d un coté , il m est donc difficile de faire la sourde oreille à tout ces saluts , je m efforce de répondre d un signe de la main ou un hello ce qui amuse toujours beaucoup surtout les jeunes filles ( ? )
Il y a aussi ce vocable typiquement indonésien qui m annonce depuis Pekanbaru BULE ( cela se prononce boulet). Sans en connaitre la signification , les premiers jours j ai beaucoup aimé me faire traiter de boulet , je l ai alors cherché dans le net . Je n aurais jamais cru que ce simple mot puisse générer autant de commentaires .
BULE: viendrait de albinos pour désigner le blanc , l occidental . Certes le mot est connoté , l albinos est celui à qui il manque quelque chose . Il n est jamais plaisant de se retrouver dans la peau de celui que l on montre du doigt pour sa différence , son anormalité , sa monstruosité , mais de là à dire comme je l ai lu que les indonésiens sont le peuple le plus raciste , cela n a pas de sens . Les thailandais ont leur farang et les indiens des millions de manières pour vous montrer que l autre c est vous .
Bien sur qu il y a du racisme , mais j y vois le plus souvent de l ignorance ou de la bétise . Quand je suis interpellé à un passage à niveau par un groupe de jeunes hommes par des "bule " à répétition , c est simplement le premier mot qui leur vient pour attirer mon attention et que je m arrete pour qu'ils me prennent en photo en leur compagnie . L autre ne se résume pas seulement à la couleur de la peau , c est aussi celui qui est hors du language .
Il faut juger en situation , un regard , une intonation , une humeur font toute la différence . Ni angélisme , ni généralisation , meme si quelques fois je dois le reconnaitre c est un peu enervant .

PADANG / PAINAN
77 KM ( 4159 KM )
Je m en veux de n avoir pas mieux préparé ce passage en Indonésie . Je ne sais pas comment cela se passe sur les autres iles , mais à Sumatra les gens ne demandent qu' à communiquer . Ils y a bien toujours quelques mauvais coucheurs ou de jeunes hommes travaillés par leurs hormones , mais eux restent , moi je passe , de nos deux situations je préfère de loin la mienne . D accord c est mesquin , un peu , mais je me rassure comme je peux . Ici , l anglais n est connu que de rares personnes , le plus souvent des professeurs de cette langue . Par nécessité autant que par hasard , j ai réussi à glaner quelques mots dans la bahasa indonesia , mais cela ne me permet pas d aller aussi loin que je le souhaiterais dans nos échanges . Une petite demi-heure suffit pour faire le tour de mes maigres connaissances . En Malaisie , les deux langues sont apparentées , j aurais du faire l effort d apprendre un peu plus de vocabulaire , mais l anglais s y avérant suffisant , je n ai pas jugé utile d allé plus loin .
Devant la gentillesse et l hospitalité des habitants de Sumatra , je me sens fautif de n avoir pas plus à offrir que quelques mots et guére plus de grimaces




Les photos restent une affaire sérieuse , alors on prend la mine de circonstance

MANINJAU / PADANG
121 KM ( 4082 KM )
Les cyclotouristes , ces etres étranges venus d un autre pays . Leur destination : la Terre . Leur but ; en faire leur univers . Pour moi , tout a commencé par une belle matinée lumineuse , le long d une route solitaire de campagne , alors que je cherchais un raccourci que jamais je ne trouvais . Cela a commencé par une auberge abandonnée et par un homme devenu trop las pour continuer sa route . J ai attendu , attendu , aucun vaisseau n est venu d une autre galaxie , alors je me suis mis au vélo .
Premier contact avec l océan indien

BUKIT TINGI / MANINJAU
36 KM ( 3961 KM )
La pluie peut etre reposante depuis le couvert d un auvent . L étape du jour sera courte , j ai tout le temps d apprécier la fraicheur de ce matin . hélas sous ces latitudes , 0°16'1" S ,les averses ne durent pas , il me fallut reprendre la selle
La fraicheur se transforma rapidement en moiteur , je sentis la sueur me couler entre les omoplates pendant mon ascension vers Maninjau .
Maninjau est une belle et grande caldeira , dont les bords entre lac et lèvres du volcan sont occupées principalement par des terres agricoles et quelques hotels ( prix négociables en semaine )
La montée fut notable , mais l accueil des enfants à Matur( Indah , Graha , Putra , Gus , Yusuf et les autres ) me fit vite oublier mes efforts
Il me restait "the piece of cake ", la descente vers le lac , 44 virages , j ai compté , en épingle à cheveux donnant en dépit de l atmosphère chargée d humidité ,une vue magnifique sur la caldeira


Dans ce bas-monde je trouve beaucoup de hauteurs sur mon chemin

PEKANBARU / BUKIT TINGI
224 KM ( 3925 KM )
Je n ai pas tout les jours 20 ans, il y a meme longtemps que cela ne m est pas arrivé . Heureusement j ai d autres moments uniques à vivre
En prenant la direction de l ouest j ai quitté la route à camion que je suivais depuis Dumai. Le voyage s avéra beaucoup plus plaisant hors des champs pétroliers . La route reprenait un aspect convenable à mesure que le relief s accentuait . Je prenais gout au pays . Les indonésiens devaient le sentir et me saluaient d un sourire ou d un hello mister

C est aussi impressionnant que cela en a l air
J avais estimé à un cheval près que l équateur devait passer quelques kilomètres au sud de Pangkalan . C était ma première traversée de cette ligne géographique . Si je n avais pas su qu il passait à cet endroit je ne m en serais pas aperçu . Il est toujours désagréable de me rendre compte que mes horizons ne sont que des miroirs aux alouettes . Je ne m attendais pas à un truc extraordinaire , pas à une ligne rouge tracée au sol ni meme un arc triomphant , mais un simple panneau pour signaler le lieu m aurait fait plaisir
Pour marquer le coup j avais prévu de passer la nuit là ou je pensais que l équateur passait . J aurais pu mieux choisir , ce n était que collines et jungles .


Je cherchais un bon moment sur ces flancs escarpés avant de trouver dans un bosquet en contre-bas de la route une petite cabane sur pilotis qui doit servir de refuge aux forestiers . Je réussis après quelques difficultés à caser ma tente et mes sacoches sur le plateau étroit de l abri .

Pour célébrer l évènement , je fis collation de crackers à la crème et bu une bonne rasade d eau tiède .La nuit vint rapidement , elle s annonçait belle . J ai rarement vu un ciel sans lune aussi clair , les étoiles apparaissaient par centaines avec une netteté enthousiasmante , je m étonnais dans leur contemplation . Une étoile par timidité sans doute , fila , que m importait , il en restait suffisamment pour que je m endormisse en les comptant
Un , deux , trois , sommeil ...
Cette histoire d équateur m a bien été utile pour faire une étape , je dois bien avouer j étais sur les rotules et à vélo ce n est pas pratique.

Au matin je reprenais tranquillement ( hati hati ) mon ascension . Les camions semblaient faire une pause . Les rares personnes que je croisais , encore dans les replis de leur nuit regardaient incrédules cet étrange étranger qui suait sur son vélo à une heure aussi matinale . La descente fut longue et pénible ,sur de larges portions de la route de nombreux travaux étaient en cours et les autres tronçons en auraient besoin
J arrivais fourbu mais content à Bukit Tingi . La ville me plu . J y fis quelques jolies rencontres ( salut à Lily comme la fleur et à Hussein pour sa chemise ), et trouvais le populeux bazard plein de couleurs , d odeurs et de curiosités
La charmante ville deBukit Tingi

DUMAI / DURI / PEKANBARU
207 KM ( 3701 KM )
Ces deux premières journées sur les routes indonésiennes m ont franchement inquiété . La région est à ranger dans les dommages collatéraux de l exploitation pétrolière .


Je fus assez peu sensible à la beauté des énormes réservoirs , des torchères , des cheminées ou des mémoriaux à la gloire de Chevron qui jalonnèrent mon chemin . La tuyauterie qui traversent en tout sens le paysage ou en tout cas ce qui en reste , ne m aida pas beaucoup en ce sens .

Les espaces laissés libres sont avidement occupé par les plantations de palmiers à huile . Le tout baignant dans une brume dont la "nature" me laissait peu de doute

Les routes bien encadrées par des pipelines , passées au laminoir d innombrables roues de camions sont rendues informes par les effondrements , éclatements , tassements , envasements et bien d autres maux en ment peu appréciés par le pauvre cyclotouriste que je suis
j ai oublié de parler de la poussière

Maintenant que je sais que mon vélo à le pneu marin , je ne me suis pas inquiété et j ai pu profiter tranquillement du voyage , dommage que les vitres du ferry fussent bien sales que je n ai rien vu de la traversée.

Mon arrivée en Indonésie c est bien passée . A peine passé les formalités douanières , j ai posé en compagnie de 2 ravissantes jeunes femmes pour une pub pour Hotlink (un fournisseur en téléphonie ) .Puis je suis devenu une nouvelle fois millionnaire grace à la magie des taux de change , qui est beaucoup plus efficace que la française des jeux. je le fus déjà au Laos , mais je restais saisi de vertige devant tout ces zéros qui sont miens , une curieuse forme de la peur du vide . Et surtout j ai fais la connaissance de Monsieur MUCHSIN .

Petit retour en arrière .
J allais passer sous la douche , je dois avouer que comme toujours j avais pris un peu de retard à ce moment j aurais du etre en train de me savonner , quand le téléphone de ma chambre d hotel sonna . Un homme me demandait poliment de bien vouloir le rencontrer dans le hall d entrée . La curiosité tue les chats , je n en suis pas ,je descendis donc sans passer par la case de bain voir cet inconnu . Un petit homme au buste impressionnant s avança vers moi , il n avait de chance guère se tromper j étais le seul occidental de l hotel . Il me serra la main et se présenta "Monsieur MUCHSIN" . Il m expliqua qu il était prof d anglais dans une petite école privée , la GRAND ENGLISH COURSE et qu il avait l habitude de demander aux touristes de passage à Dumai , ils sont rares , d etre intervenants bénévoles dans sa classe , allant jusqu à proposer gracieusement une chambre sommaire mais décente à ceux qui acceptent de lui préter assistance , selon le meme principe que warmshower ou couchsurfing . Je n ai rien contre les nouvelles expériences mais me retrouver devant des adolescents dans un cadre éducatif ne m a pas laissé que des bons souvenirs . J essayais de me défausser en argumentant que ma connaissance de la langue de Margaret Thatcher etait un rien approximative et qu en tant que français pour la prononciation ,je n étais pas l exemple réver à donner à des enfants . Il m a dit que toutes les bonnes volonté étaient les bienvenues , il a reçu l aide de japonnais qui n avaient que quelques mots à leur vocabulaire , ce n était pas là l essentiel , mais qu il cherchait à ouvrir ses éleves au monde extérieur , les mettre en confiance dans leur relation aux autres et dans l usage de l anglais ( Little is better than nothing ) et non à faire de jolis souvenirs ou de belles photos aux touristes . Meme les japonnais , je ne pouvais pas refuser .
Si je dois avoir un regret c est sur mon hésitation , l expérience fut exceptionnelle , pas sur mes capacités dans la langue de mister Bean , de nombreux professeurs n y ont jamais crues , mais grace à la gentillesse et à la patience de ces jeunes indonésiens j ai beaucoup appris.
Si vous passez par Dumai , ne prenez pas le premier bus vers une destination plus avenante , mais passez voir Monsieur MUCHSIN ( tapez MUCHSIN Dumai dans votre moteur de recherche pour ses coordonnées ) et ses élèves passer un moment qui vaut bien des couchers de soleil sur l océan indien