blog de lachaineaupied

A l aube , je regarde la pluie tombee depuis la fenetre de ma modeste chambre ( 60.5 ringitts ) . Je suis alle dans un warung proche prendre un petit dejeuner , mee soto ( soupe de pates ) , dans l espoir que la meteo s arrangerait le temps de mon repas . Il me suffit d un coup d oeil a la vallee noyee dans les nuages pour me convaincre qu aujourd hui encore je roulerais les fesses humides
La soupe etait bonne
Les nuages me cachaient les premiers reliefs depuis mon entree au Sabah , les Taviu Hills . Une montee toute en douceur au travers une belle foret . Je pedalais au rythme des plics et des plocs de la pluie sur les gigantesques feuilles des arbustes qui trouvent en bord de route , le seul espace que n occupent pas deja les grands arbres . Une famille de gibons , plus petits et plus sombres que leurs cousins indiens les langurs , me regaderent passer avant de reprendre sans attendre leurs chamailleries
Puis ce fut la descente , dans mon elan je transpercais les nuages pour arriver sous un ciel plus clement a Paginatan
Trempe mais heureux , je ne le suis jamais autant qu au milieu des collines boisees , je m octroyais une petite collation au restoran I AZAM , la bonne adresse de Paginatan


Humide pour la saison

Apres 300 kilometres de palmiers a huile , j ai eu envie de changement . Je suis alle a Sepilok , connu dans les guides touristiques comme lieu de rehabilitation des orang outan ( je ne sais pas ou mettre le s , mais il y est ) ou il est facile de voir ces primates , et par les locaux connus comme le zoo .
J y ai trouve un grand camp de vacances , peuple de visages pales
Le soir au restaurant , j y ai revu les memes tetes , ou tous , grand et petit , etaient attables devant leurs ecrans .
Durant ce voyage , meme la nuit sous ma tente en pleine foret , je ne me suis jamais senti aussi seul
Au petit matin , lachement je me suis enfui

La route ne pouvant me mener plus loin , je suis descendu de ma bicyclette pour prendre le bateau . Pas de ligne direct , un premier changement a Tarakan , ou je pris un speed boat pour nunukan et de la un autre pour Tawau , ou je passais au mieux 3 heures a faire la queue pour obtenir un visa malais . Les choses se sont passees etonnamment bien lors des transbordements , encombre que j etais d un velo et de 4 sacoches

Apres avoir courageusement pris un bac pour rejoindre l autre rive de la karangan , je me suis lance a l ombre des palmiers a huile , dans ce qui allait etre 2 longues et penibles journees devant me conduire jusqu a Berau . Dans cette partie nord du Kalimantan les domaines de culture du palmier a huile reignent en maitres . La jungle n y subsiste que par ilots qui a plus ou moins longue echeance sont voues a disparaitre . La route ne semble utile qu a l exploitation du palmier a huile . Elle n est faite la plupart du temps que de gravier , de terre , de trous et de bosses. Il n y circulent que des motocyclettes et de rares camions qui s annoncent par d impressionnants nuages de poussiere . Ici , pas de panneaux indicateurs , pas de bornes kilometriques , ma carte ne m a pas ete utile tres longtemps , je n y trouvais aucun point de repere si ce n est la Karangan . Je dus me fier aux renseignements que je glanais aupres des ouvriers agricoles que je croisais pour ne pas me perdre dans ce dedale de pistes .

le fameux palmier a huile
A un carrefour , je ne trouvais personne pour m aider . Je jettais sans grande illusion , un oeil sur ma carte , autant par habitude que pour me faire un peu d ombre.
Dans une telle situation , qu auraient fait Nicholas Bouvier , Jacques Sirat ou Bob Morane ?
Je n en sais rien . Mais je me rappellais cette phrase celebre du Yogi Bera : " If you come to a fork in the road , take it " et pour me rassurer celle d Audiard : " Un intello assis va moins loin qu un con qui marche "
Alors osons !
J osais !
C est d ailleurs a cela que l on me reconnais
Heureusement , un peu plus loin je croisais la route de Bambang . Bambang est camioneur , il fait la navette entre les lieux de recolte et de collecte des fruits des palmiers a huile . Lorsqu il a su que je me rendais a Berau , ou du moins j essayais , il me parut effare .
" Jauh jauh ! " ( c est tres loin )
Et en plus ce n est pas la bonne route

Monsieur Bambang
Il n hesita pas a me prendre a son bord , velo et bagages inclus , pour me transporter une quinzaine de kilometres plus loin , c etait me dit il sur son trajet , et me remettre sur le droit chemin . Avant de nous separer , il voulut savoir pourquoi je passais par la et en velo de plus . J essayais de lui faire comprendre que c etait pour le plaisir de le rencontrer , mais je ne pense pas l avoir convaincu .
Orang asing yang aneh
Apres mes souvenirs se perdent dans la sueur et les nuages de poussiere .Je ne sais pas combien de kilometres j ai pu faire , ni meme quelle route j ai bien pu suivre , mais l important n est il pas d arriver .
Je ne retrouvais mes esprits que sur le pont a l entree de Berau , ebloui par les lumieres et l agitation de la cite . Sensation qui ne resista pas a une bonne nuit de sommeil

Depuis la selle de mon velo ,le kalimantan peut se resumer a de la route ,de la foret ,un peu de pluie et beaucoup de cotes .
A peine ai je atteint le sommet de l une d elles que je doive la redescencre et une fois en bas , remonter ,avec des pourcentages que je trouve a la longue un peu exageres . J ai limpression de me debattre dans le soufflet d un accordeon
Les sourires des kalimantanais est encore plus grand et beau que celui des javanais , une gageure . C est impressionnant la force que je peux tirer de ce simple signe de sympathie , et par moment cela m est fort utile
Les bornes kilometriques se font de plus en plus rares ,jusqu a disparaitre . Cela me donne une bonne raison de faire une petite halte pour demander avec mon superbe accent 100/100 breton " berapa kilo sampai Sengatta ? " ( combien de kilometres jusqu a Sengatta? ) . On me regarde dans un premier temps avec surprise , puis avec un grand sourire on me repond invariablement quelque soit la distance restante " Ini jauh ! " ( "c est loin " ). Ce n est pas forcement la chose la plus agreable a entendre apres plusieurs heures passees a travers les collines ,mais c est une bonne maniere d engager la conversation . Mon indonesien commence a prendre forme , laquelle je ne sais pas encore mais je vous tiens au courant . Ce qui est une bonne chose dans un pays ou l anglais reste une langue etrangere
En arrivant a Bontang et apres avoir jetter un coup d oeil a ma carte , je me suis rendu compte que j avais traverse l equateur . Comme quoi les cartes peuvent servir a quelque chose
Passe Sengatta ,je n ai pas trouve le souvenir du passage d un precedent cyclo ,ni meme d un touriste . Le regard des gens est amuse et tres etonne de me voir debarquer sur ma bicyclette . On me trouve et on me le dit aneh ( bizarre ou un truc comme ca ,enfin je crois ) . En ce qui me concerne , boulet ( bule ) reste le plus utilise . Quand on m interpelle , c est sans malice que l on me dit " Hello misteRRR bule " ( les R sont moins marques dans le coin ), " ou tu vas bule ? " , " Ca vas bule? " . MisteRRR , bule et aneh ,cela commence a faire beaucoup de monde sur mon velo, mais j ai hate de connaitre les autres.
jalan rusak =route cassee
La route est devenue difficile ,pas de revetement pendant de longs kilometres . Beaucoup de poussiere qui se transforme en boue collante a la moindre averse , ce que le velo apprecie moyennement
C est surtout qu elle n a jamais ete fini.
Un projet de 2 ans est en court pour l ammenagement d une belle route entre Sengatta et Sangkulirang ,mais semble n etre qu a son debut
La fine equipe chargee de nous faire une belle route
Sangkulirang est une petite ville posee sur une ile pres de l embouchure du fleuve Karangan . Les gens s y sont montres tres accueillants quoique plutot perplexes
Plus que 21 km

Mon vol etait prevu a 6 h45 ,je suis arrive a l aeroport vers les 5 h 15 . Bonne nouvelle , il est ouvert . Au tableau d affichage , mon depart est retarde jusqu a 8 h 40 . Rien de bien mechant juste le temps de boire un cafe , ce que je n ai pas encore eu le temps de faire , et d aller au check-in . J ai eu raison de ne pas me presser car une fois mes bagages et mon velo enregistres, je vois sur ma carte d enbarquement que mon vol ne part plus qu a 11 h 40 . Bon , j ai largement le temps de deguster un cafe , big size cette fois . A 11 h 20 , mon vol disparait du tableau des departs , au renseignements apres de longues excuses on me demande d attendre . Un petit cafe ne serait pas de refus . 13 h 30 toujours pas d infos mais encore des excuses et un cafe. Je suis etonne par la patience que montrent les indonesiens alors que seul notre vol pose des problemes et sans qu il nous soit donner la moindre explication . Malgre la grande quantite de cafeine que j ai a present dans les veines , je m applique a faire de meme . Fin des excuses , la situation semble evoluer . 14h 35 nous passons le controle avant l embarquement . 14 h 50 nous traversons le tarmac sous une petite pluie tres agreable afin de rejoindre l avion . 15 h 25 nous decollons

17 h 45 dans le hall des arrivees a Balikpapan , sous les regards amuses et etonnes d une petite foule , je remonte mon velo pour aller en ville . Il fait nuit mais de pedaler un peu me fera le plus grand bien
Durant ce voyage ,je n ai pas seulement perdu la journee ,mais aussi une heure du au decalage

J ai passe plusieurs heures au bureau de la compagnie aerienne garuda avant d avoir obtenu une information de premiere main au sujet de mon vol pour Balikpapan . Personne ne sait rien , ni meme quand l aeroport ouvrira .
Je vais tout de meme tenter ma chance demain

Un peu pateux , je commencais peniblement ma journee dans un petit matin blaffard . Je n eus pas a aller bien loin avant d etre recouvert de la tete aux roues , d un epaisse couche de poussiere et d avoir entre les dents une desagreable sensation sableuse . De la poussiere grise, il y en avait partout , sur la route , les vehicules , les arbres , les gens ,et bien qu il fasse jour un chat. Je pensais me trouver pres d une cimenterie un peu exuberante , comme il en existe en Inde, mais apres quelques dizaines de kilometres la poussiere ne diminuant pas , je trouvais que cette usine devait etre sacrement baleze .

Ce n est qu une fois arrive a Surabaya , que j appris que le volcan (gunung api ) Kelud avait dans la nuit passee , fait une belle eruption et couvert la region d un manteau de cendres . Compare aux images que j ai pu voir de Yogyakarta ou Blitar , les vents ont epargnes Surabaya et c est tant mieux , du moins pour moi car il y a eu 2 morts et 200 000 personnes deplacees. Toute fois l aeroport de la ville est ferme , ce qui est ballot car j etais venu la pour y prendre l avion pour le Kalimantan
Il a plut dans la soiree , mais je doute que cela suffise pour laver la ville de ses cendres

Le petit poucet marquait son chemin de petits cailloux blancs , le mien est jalonne de boulet
Ce matin , je me sentais d humeur champetre . Je quittais rapidement la voie principale pour aller egrener le long chapelet des villages du cru , Wedi, Cawas , Weru, Tawang sati , Bendesai , Ngunut , Jumapolo , Mateshi ... Les routes de campagne sont dans un sale etat et les flancs du mont Lawu bien raides .Heureusement qu il y avait les indonesiens pour m encourager d un sourire , d un signe de la main , d un simple "hello" , d un tonitruant "misteRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR" ( les javanais savent rouler les R , comme jamais je ne le saurais , etre francophone a son prix. Pourtant , je me suis entraine en suivant les conseils donnes sur youtube par de jeunes hispanisantes . Devant tant d application et de demonstration, je finis par me demander ce que ces directives linguales etaient en fait sensees rouler ) et , nous y voici , de " boulet"

Boulet , c est en tout ainsi qu a mon oreille de francais moyen , sonnait ce petit nom dont je m entendais affubler . Vu le sens que ce mot peut prendre dans la langue de Jean-claude Van Damme , je trouvais cela tres amusant . Apres verification , ce boulet serait bule , deformation , comme si cela ne lui suffisait pas , d albinos . Ce terme sert a designer en general les etrangers et en particulier moi . Comme tout les mots valises , il peut dire beaucoup de choses , l important etant dans l intention de celui qui le dit . N etant pas de nature tres intuitif , et jugeant les javanais bien gemtils , quoiqu un peu moqueurs , mais cela me les rendrait plutot sympathiques , c est en toute ingenuite que je continue de rouler boulet ( bule )

Il y a quelques annees ou un peu plus , a la bibliotheque municipale de Marly-le-roi , Yvelines , je decouvrais dans un beau livre de photos sur les merveilles de l Asie du sud-est un chapitre sur Borobudur , accompagne de textes que je trouvais d autant plus passionnants qu incomprehensibles . Les decenies passerent , mais pas ma curiosite qui ne cessa de croitre a mesure que mon ententement du trantrisme s affirmait

C est charge de cette longue attente que j arrivais au pied du monument. Pourtant , je n y ressentais aucun echo , si ce n est celui des rires et des chahuts des jeunes indonesiens venus par cars entiers , visiter ce haut leu de leur histoire , et qui par ennui , nous avons tous souffert de ces voyages scolaires , font subir les derniers outrages aux bouddhas , qui apres mille ans n en esperaient peut etre pas autant
Il faut toujours voyager leger