Face à un afflux touristique sans précédent, les îles Canaries ont décidé de prendre des mesures concrètes pour freiner les effets négatifs du surtourisme. La petite ville côtière de Mogan, située à Gran Canaria, sera la première à introduire une taxe de séjour dès janvier 2025. Fixée à 0,15 € par jour et par personne, cette initiative symbolise un tournant décisif pour la région. Si cette somme paraît modeste, elle représente un signal fort pour un tourisme plus durable. Mais quelles sont les raisons derrière cette décision, et quels impacts sont attendus pour les habitants et les visiteurs ?
Pourquoi les îles Canaries s’attaquent au surtourisme ?
Avec plus de 14 millions de visiteurs en 2023, les îles Canaries sont devenues une destination incontournable pour les vacanciers du monde entier. Toutefois, ce succès économique a un coût environnemental et social majeur. Les infrastructures locales peinent à suivre le rythme, tandis que les ressources naturelles, comme l’eau potable et les plages, subissent une pression constante.
Les villes emblématiques telles que Maspalomas et Playa de las Americas sont souvent saturées, entraînant une hausse du coût de la vie pour les habitants. Les locaux dénoncent une qualité de vie détériorée, aggravée par les embouteillages et la pollution. En réponse à cette crise, des manifestations massives ont eu lieu en 2024, réclamant des actions immédiates. Des militants sont même allés jusqu’à des grèves de la faim, témoignant de l’urgence ressentie par la population.
La taxe de séjour s’inscrit ainsi dans un cadre global visant à rétablir un équilibre entre les besoins des visiteurs et ceux des habitants. Elle doit servir à financer des projets locaux durables et à protéger l’environnement, tout en envoyant un message clair : le tourisme aux Canaries doit être repensé pour être plus responsable.
Une taxe de séjour aux multiples objectifs
Dès janvier 2025, la taxe de séjour de 0,15 € sera appliquée à tous les types d’hébergement à Mogan :
- Hôtels et complexes touristiques
- Locations de courte durée
- Appartements de vacances
Ce système garantit que chaque visiteur contribue équitablement, qu’il s’agisse de touristes à petit budget ou de vacanciers haut de gamme. Mais quels en sont les principaux objectifs ?
- Protéger les communautés locales
La surpopulation touristique pèse sur les services essentiels comme les transports, la santé et l’éducation. En collectant des fonds auprès des visiteurs, les autorités visent à atténuer ces pressions et à améliorer la qualité de vie des résidents. - Préserver l’environnement
Les revenus serviront à des projets écoresponsables : gestion des déchets, entretien des plages et création d’infrastructures vertes. La beauté naturelle des Canaries est l’atout majeur de la région ; sa préservation est une priorité. - Garantir une équité économique
Les touristes bénéficient de l’infrastructure locale, mais jusqu’ici, les habitants supportaient seuls les coûts d’entretien. La taxe permet de rééquilibrer cette charge, en encourageant un tourisme respectueux et durable.
Mogan : un exemple à suivre pour le reste de l’archipel
Si Mogan est la première ville à adopter cette taxe, elle ne sera probablement pas la dernière. Les autorités locales de Tenerife, Lanzarote et d’autres hauts lieux touristiques surveillent de près cette initiative.
Le succès de la taxe à Mogan pourrait ouvrir la voie à une adoption généralisée sur l’ensemble des îles Canaries. Cette démarche s’inscrit dans une tendance européenne plus large. Des villes comme Venise en Italie, Barcelone en Espagne et les îles Baléares ont déjà mis en place des taxes similaires avec des résultats positifs :
- À Venise, les excursionnistes doivent payer pour limiter la saturation de la ville.
- À Barcelone, les taxes financent des projets de préservation culturelle et environnementale.
- Aux Baléares, les fonds soutiennent des initiatives écologiques.
Les Canaries espèrent que l’exemple de Mogan encouragera d’autres régions à prendre des mesures similaires pour protéger leurs ressources naturelles et le bien-être de leurs populations.
Les critiques et les attentes des habitants
Si la taxe de séjour représente un pas en avant, certains habitants et militants estiment qu’elle reste insuffisante. À leurs yeux, la somme de 0,15 € est trop faible pour avoir un réel impact. Ils demandent des actions plus audacieuses :
- Des quotas de visiteurs pour limiter les flux touristiques.
- Un contrôle accru des locations touristiques, souvent pointées du doigt pour aggraver la crise du logement.
- Une hausse significative de la taxe pour financer des projets d’envergure.
Les manifestations de 2024 ont montré que les Canariens sont prêts à se battre pour un changement profond. Pour eux, il ne s’agit pas seulement de collecter des fonds, mais de repensser entièrement le modèle touristique actuel.
De leur côté, les autorités locales défendent la taxe comme un premier pas concret, soulignant qu’elle pourra évoluer en fonction de son succès. Le défi reste de trouver un équilibre délicat entre l’économie touristique et la protection des intérêts locaux.
Un pas vers un tourisme durable aux Canaries
L’introduction de cette taxe s’inscrit dans une démarche plus large visant à promouvoir le tourisme durable. Les autorités envisagent également d’autres stratégies pour gérer les flux touristiques :
- Promouvoir le tourisme hors saison pour réduire la pression durant les périodes de pointe.
- Valoriser les destinations moins connues afin de désengorger les sites populaires.
- Éduquer les visiteurs sur l’impact de leurs voyages et les encourager à adopter des comportements responsables.
Ces initiatives visent à redéfinir le tourisme aux Canaries pour qu’il profite à toutes les parties prenantes, tout en préservant les paysages exceptionnels qui attirent les visiteurs.
Que retenir ?
La mise en place d’une taxe de séjour à Mogan marque un tournant pour les îles Canaries. Si son montant reste symbolique, cette mesure envoie un message clair : le surtourisme ne peut plus être ignoré. En réinvestissant les fonds collectés dans des projets écologiques et communautaires, Mogan ouvre la voie à un modèle de tourisme durable.
Cependant, la route vers un tourisme plus responsable est encore longue. Les Canariens attendent des actions plus audacieuses, telles que des quotas de visiteurs et des réglementations plus strictes. Cette taxe n’est qu’un début, mais elle pourrait bien inspirer d’autres régions à suivre l’exemple.
En équilibrant développement économique et préservation environnementale, les îles Canaries espèrent trouver une solution durable qui protège leur patrimoine tout en continuant d’accueillir des millions de visiteurs chaque année. Reste à voir si d’autres villes de l’archipel embrasseront cette nouvelle dynamique.